Note d'intention
Il semble que tout allait bien dans la vie de Lette, ingénieur et inventeur d’un convecteur électrique révolutionnaire. L’histoire débute comme un conte fantastique. Il se prépare à présenter son invention en public, dans des congrès internationaux et à faire le succès de l’entreprise qui l’emploie. L’homme, qui s’est cru jusque-là normal, vit un cauchemar quand son patron l’écarte au profit de son assistant sous prétexte qu’il est trop moche pour espérer vendre le produit. Quand il interroge sa femme, qu’elle confirme qu’il est effectivement très moche, et qu’il devrait le savoir, il voit le monde basculer dans l’irrationnel. Comme Grégoire Samsa dans la « Métamorphose » de Kafka se réveillant dans le corps d’un cafard, il doit intégrer ce qui devient désormais la vérité : il est moche. Très moche. Il décide alors de se lancer dans la chirurgie esthétique et de se faire faire un nouveau visage. C’est la suite du cauchemar : il se retrouve sur une table d’opération. Un chirurgien qui ressemble étonnamment à son patron se prépare à lui charcuter le visage, assisté d’une personne qui ressemble étonnamment à sa femme…
Contre toute attente, l’opération réussit, il devient beau. Très beau. Il reprend sa place dans l’entreprise. Le regard des autres change. Courtisé par les femmes, par ses collègues, par la direction, il retrouve la voie du succès. Il est médiatisé. Tout irait pour le mieux si le chirurgien, fort d’un tel triomphe, ne se mettait à reproduire son visage à l’identique sur ceux qui en font la demande, et qui peuvent payer. D’autres arrivent donc avec la tête de Lette. Il n’est plus unique. Pour lui, c’est la chute. Il tente de retrouver en vain le visage qu’il a perdu - le sien - dans ce pacte Faustien.
Si la fable remplit d’effroi, elle est écrite tout en légèreté. Les dialogues sont très vivants et les situations drôles. L’humour de Mayenburg est partout dans le texte. Il n’est pas sans rappeler celui de Ionesco. Mais lui montre l’absurdité au présent. Ici, c’est un focus sur les comportements ridicules que produit ce monde d’entreprise, de concurrence déloyale et d’argent fou.
Distribution : 4 comédiens jouent 8 rôles. Une femme et trois hommes. La pièce est écrite pour ça, et cela donne une forme très originale.
Scénographie : La lumière, les reflets joueront un rôle important dans un espace simple où apparaîtront par moments des éléments réalistes comme dans un rêve.
Pierre Pradinas, 5 Décembre 2018
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